Ça pourrait aller mieux.
En marchant, je respire l'air du printemps qui s'achève, qui fleurit, qui mérite son été. L'année ne se poursuit pas bien.
Je suis qui, moi, au fond? Jour après jour, je vois deux bras maigres se balancer pour nourrir le reste, souvent deux pieds qui vont et viennent, et le plafond de ma chambre. Triste trame de fond sur mes regrets, ma case départ et ma haine.
J'ai l'impression de salir cette âme curieuse quelque part en moi, de l'alourdir et de sombrer dans l'envie, la jalousie et la peur de m'effacer à jamais. Cette crise dure depuis trop longtemps: pour créer efficacement, car c'est bien ma fonction après tout, que je le veuille où non, je dois me convaincre que les autres sont médiocres, question d'entrevoir une prise dans la brume.
Et les lignes s'enchaînent comme ça. Je ne suis plus convaincu de leur vigueur, de leur intérêt. En fait je n'ai même plus l'impression de justifier ma tristesse par une cause noble comme l'amour, l'infestation de la solitude a détruit trop de cellules cognitives, sociales et codantes.
À vrai dire Laurie, ce que je ressens est une bien pâle copie de ce que tu mérites. La tache aveugle est complète, je n'y vois absolument rien, je ne souhaite plus ton bonheur, je ne l'accepte plus, car je sais que je n'y suis pour rien. Faute de mieux, j'étudie soigneusement ta perte, constamment, j'anticipe toujours ton malheur, l'espérant presque, qui pourra au moins faire la méiose des tons.
Ainsi donc tout est encore rupture, partout autour de moi, dans ceux qui m'entourent, ceux qui m'aiment, je les noircis d'encre pour phagocyter.
Cette âme curieuse, blanche qui me pousse à écrire, encore, elle me transperce. Meurtrie, elle n'accepte pas l'autre, car il est forcément ailleurs, sur une lancée différente, habité d'une énergie propre.
Je ne veux pas de confrontation. J'ai seulement pris du retard sur moi-même.
Dans dix jours, ce sera la fin des lilas.
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