Trance

Réception. Lente et gracile, j'ai trouvé une île où poser le pied. Il s'écrase, puis c'est la détente, souple.

J'ai cru bon de mettre un peu d'ordre.

Les fragments volaient au ralenti, leur tranchant devenait une curiosité, qui projetait quelques nanomètres irisés dans mon oeil calme. Je les regardais flotter, joli spectre, obéissant passivement au nombre d'or.

Bon, d'accord, j'agirai comme interprète. Je suis très désordonné ces temps-ci, je ne place pas une idée devant l'autre sans en attirer une autre contradictoire, perverse mais douceâtre. Je ne me rappelle plus si j'ai payé en sortant des commerces, et souvent j'y retourne pour m'enquérir de ma droitesse morale.

Je ne tiens pas d'agenda, je note tout dans ma tête ou sur des bouts de papier que j'égare.

Je n'accorde plus d'importance au temps, à la routine. J'évolue dans une réalité qui m'échappe, sur une obscure tangente aux habitudes. Je danse un boléro arithmique entre les gens.

Mais tout explose au ralenti. Les échéanciers, les principes, l'enthalpie. Comme une bombe terrible, dont la déflagration coule lentement dans le vent en draps lourds et ambrés, chauds.

Et j'ai les bras en croix, sous ce chaos volontairement incontrôlé, tête rejetée vers l'arrière, appréciant le désastre.

Venons-en au fait, s'il te plait. Sans vouloir paradoxer ton hamac, je tiens à dire que c'est la dissolution de mon cartésianisme fondamental, targué de cette brique orgueilleuse enchâssée dans notre phénotype constitutionnel qui flanque des coups de pieds dans tes frêles préceptes. En d'autres mots, je crois que mon côté Roman, chantant et aérien, n'est pas à la source de ce constat d'érosion régressive, goûteux mais aigre.

Tout revient au terrestre, à pouvoir se poser. Et même s'il glisse là-haut, sur près de 9oo km en quelques brasses, même lui doit s'y soumettre, quoiqu'en dise Nelligan.

Alors me voici. Je n'ai pas d'organisation, pas une once, pas une miette, seulement une vaporeuse esquisse de réalité.

Et j'emménage en appartement demain.

Les cheveux rasés, t'as l'air plus sérieux, thought.