Ou mieux: une bonne leçon.
***
Commençons donc cette petite histoire du début. Amusez-vous. Y'aura même pas de figures de style.
Nous sommes voilà deux jours, le 7 mars. J'ai travaillé à temps plein pendant ma semaine de relâche, et je suis fatigué, mais étrangement vivant, sur la lancée d'un horaire rigoureux. Incapable de venir à bout de mes devoirs, j'en vient au déterminisme de mon entourage immédiat, la fête. Bon, je manquais de coeur, je pourrissais d'isolement depuis deux semaines, mais j'ai quand même pris la peine de le faire.
Ainsi donc, le vendredi, je fais bouger ma carcasse et ses dépendances matérielles d'une fête à l'autre, il semble même que le sort veuille me donner des occasions un peu partout, auxquelles je me hâle sans trop ciller.
Mais au retour, rien n'a changé. Vers 2 heures, je reviens à la maison dans le même état d'esprit qu'au départ.
Je me retrouve assis devant l'ordinateur, un curseur clignote, et je commence à écrire rageusement. Voici le texte en question, entêté "Workforce":
"On s'enorgueillit en fonction de ceux qui s'en crissent".
La nuit, du haut des Laurentides, le Saguenay ressemble à un pointillé épars, une faible corrélation linéaire de points jaunes. Mais ça, on le sait déjà, nous. En revenant du parc, il y a toujours cette petite transe en basse pression, très haute sous le ciel fauve, qui provoque l'émerveillement, la sécurité.
Ce sont des cheminées, nos gratte-ciel.
De l'oxyde nitreux. Des composés carbonés.
Des transformateurs. Des catalyseurs.
Des vibrations. Des combustions.
Du fret. Des pick-ups.
C'est tout ce qu'on a.
Il faut se le rappeler de temps à autre, car les hörsts environnants se referment sur la vallée comme une mâchoire.
On est tous des crétins d'usine, filles et garçons.
Sur ces lignes, que je ne poste pas par honte, je me pelotonne dans mes draps et m'endors, sans rêver.
Le lendemain matin, le téléphone sonne. Je serai Disc-Jokey dans la soirée.
Nerveux, je me présente donc sur les lieux du contrat, valises à la main, avec l'impression de dégager le renfermé, l'asocial. Et c'est elle qui se présente a moi en premier.
***
C'est donc de la fascination qui me garde éveillé. Évidemment, c'est une perception à sens unique qui ne demande rien. Un sourire, ça change le mal de place. Il me fallut un effort pour être professionnel et m'empêcher de me rapprocher de cette figure d'acceptation lumineuse, comme une drosophile pour une lampe.
Voilà l'ironie: relisez le texte indenté. C'eût été un constat de médiocrité humiliant que d'avouer ma prosternation envieuse devant la "masse industrieuse". Mais cette serveuse, fleurant l'avenir et la plénitude, m'enfonçât mes revendications en travers de la gorge, éveillant mes sens. Ça devient récurrent.
Je mixais mes chansons sans trop y penser, et par la baie vitrée, l'Alcan se déployait, crachant une fumée âcre.
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